Ces dernières années, les délais de préavis et les règles de licenciement ont été modifiés en profondeur par la loi sur le statut unique et la convention collective de travail (CCT) n° 109. En compagnie des avocats Olivier Wouters et Arnout Crauwels (Claeys & Engels), nous faisons le point sur la question et tirons quelques enseignements pour les employeurs.
la loi sur le statut unique est entrée en vigueur le 1er janvier 2014. Peut-on aujourd’hui parler d’une égalité totale entre ouvriers et employés en matière de règles de licenciement ?
Olivier Wouters : « Pour les salariés engagés après le 1er janvier 2014, les deux statuts sont désormais alignés, du moins en ce qui concerne les délais de préavis et les règles de licenciement. Des différences subsistent par contre dans tous les autres domaines, tels que les vacances, la sécurité sociale et les commissions paritaires. Donc, oui, un pas important a été franchi en termes de délais de préavis et de règles de licenciement, mais pour toutes les autres questions, il reste beaucoup de travail à faire. En outre, la loi sur le statut unique a suscité un certain nombre de questions d’interprétation, notamment autour des dispositions transitoires applicables en cas de rupture d’un contrat de travail conclu avant le 1er janvier 2014. »
quelles sont les lacunes de la législation sur le statut unique ? À quelles questions vous trouvez-vous confrontés concernant son application ?
Arnout Crauwels : « Au départ, on ne savait pas très bien à qui le régime transitoire, la fameuse règle de la double photo, s’appliquait au juste. En principe, le délai de préavis destiné à compenser l’ancienneté jusqu’au 31 décembre 2013 doit être calculé sur la base des anciennes dispositions. On calcule ensuite un deuxième préavis pour compenser l’ancienneté à partir du 1er janvier 2014 jusqu’à la fin effective du contrat de travail. En additionnant les deux, on obtient le délai de préavis global applicable à ce cas précis. Les clauses de résiliation fixées avant le 1er janvier 2014 compliquent parfois les choses. La question s’est posée à plusieurs reprises de savoir si et comment un employeur devait appliquer un accord contractuel sur la durée du préavis à l’ancienneté totale. En fin de compte, la Cour constitutionnelle a dû intervenir pour apporter certains éclaircissements.»
la procédure de reclassement professionnel occupe une place importante dans les règles liées au licenciement. Avez-vous également constaté des problèmes juridiques dans ce domaine ?
Olivier Wouters : « Bien qu’ils en aient le droit, certains employeurs hésitent à déduire quatre semaines de salaire de l’indemnité de licenciement pour compenser l’offre de reclassement professionnel qu’ils doivent faire. Ils rechignent à tirer un avantage financier d’un licenciement. Le problème de l’application réside dans le fait que la valeur du reclassement doit être égale à 1/12 de la rémunération annuelle, avec un plafond fixé à 5.500 euros. Mais dans le cas d’un cadre qui gagne 7.000 euros par mois, les règles vous permettent de retenir environ 7.000 euros, alors que le budget de reclassement est inférieur. Cette anomalie est parfois une source de confusion et de malentendus. »
dans quelle mesure la CCT n° 109 concernant la motivation du licenciement influence-t-elle l’employeur dans sa décision de renvoyer un employé ?
Arnout Crauwels : « Cette convention collective indique qu’un employé a le droit d’être informé par son employeur du motif de son licenciement. Mais elle prévoit également une indemnisation correspondant à trois à dix-sept semaines de rémunération en cas de licenciement manifestement déraisonnable. Dans la pratique, nous constatons très régulièrement que l’absence de preuves incite le tribunal à considérer le licenciement comme manifestement déraisonnable, et parfois même à accorder l’indemnité maximale. Les employeurs qui n’ont fait que des commentaires oraux sur les mauvaises performances n’obtiennent pas toujours gain de cause devant les tribunaux lorsque le licenciement est fondé sur ces prestations médiocres. Si les délais de résiliation sont effectivement inscrits dans la loi depuis le 1er janvier 2014 et soulèvent en ce sens un peu moins de questions, nous constatons que la CCT n° 109, en revanche, entraîne de nombreuses interrogations de la part des employeurs. Quand un licenciement est-il manifestement déraisonnable ? Et si c’est le cas, à quelle indemnité donne-t-il droit ? Tout cela est bel et bien indiqué dans la convention collective, mais avec un certain manque de clarté. Nous disposons entre-temps d’une abondante jurisprudence, mais il est frappant de constater que ces jugements se contredisent souvent. »