Chers collègues RH,
Les tendances vont et viennent. Leurs observateurs et autres académiciens sont suffisamment nombreux pour les suivre et les interpréter à la perfection. Mon approche est différente. Je pars de l’expérience de terrain, d’une vision pragmatique et affirmée sur l’évolution rapide du rôle des RH.
Les périodes de turbulences créent une dynamique. Pas pour tout le monde. Mais pour ceux qui parviennent à déceler dans ces turbulences des opportunités et revendiquent ensuite une place à la table des discussions, en tant que sparring partner stratégique de l’entreprise.
Les RH passent alors du rôle d’exécutant à celui de bâtisseur. De l’état réactif à l’état proactif. Du statut de suiveur technologique à celui de partenaire de la transformation. Avec une place attitrée autour de la table.
Comment? Voici la lettre de vœux que je vous adresse, chers collègues RH.
mon premier vœu: que vous perceviez les gens tels qu’ils sont réellement
Et si la pénurie n’était pas un problème à résoudre, mais une invitation à considérer d’un autre œil les problèmes existants?
Vous verrez alors dans un chef d’équipe fatigué un talent prêt à s’épanouir ailleurs. Vous entendrez alors le collaborateur qui rêve depuis des mois d’endosser un autre rôle. Vous considérerez votre collègue malade de longue durée dans l’optique d’un retour possible. Et vous entreverrez dans un candidat tellement plus qu’une série de cases non cochées.
C’est cela, la stratégie holistique: partir du talent, de la motivation, de la capacité d’apprentissage, du contexte et du bien-être. Et faire le lien entre ces éléments et les besoins de l’organisation.
Mon souhait pour 2026? Que vous perceviez les gens tels qu’ils sont réellement. Et que, ce faisant, vous ouvriez les yeux de nombreuses autres personnes.
mon deuxième vœu: que la croissance prenne un nouveau sens
L’époque de la croissance linéaire est révolue. La question n’est plus de savoir combien de personnes vous recrutez, mais quel impact vous créez avec celles qui sont déjà en place. La productivité et la valeur ajoutée deviennent les véritables chiffres clés.
L’accent se déplace du recrutement réflexif au développement ciblé. La reconversion professionnelle et la montée en compétence deviennent des choix stratégiques conscients.
La technologie joue à ce titre un rôle clé: la maîtrise de l’IA devient une compétence de base. Non pas comme un objectif en soi, mais comme un levier pour mieux outiller les gens dans leur travail. Car plus la technologie est présente, plus les composantes humaines gagnent en importance: empathie, sens aigu de l’analyse, connexion.
Mon souhait pour 2026? Que vous soyez des vecteurs d’épanouissement personnel. Avec la technologie comme alliée et non comme menace.
mon troisième vœu: que l’activation devienne votre moteur de croissance caché
Les malades de longue durée, les personnes sans emploi au passé professionnel très riche, les individus éloignés du marché du travail, … aujourd’hui, tous ces profils sont encore trop souvent laissés de côté. À tort, car l’inclusion n’est pas une œuvre de charité, mais un atout pour les organisations, une nécessité économique et une vocation sociale.
Cependant, l’activation exige plus que de bonnes intentions: elle nécessite un accompagnement, un job crafting intelligent, des personnes relais et un leadership qui offre une réelle sécurité psychologique.
Mon souhait pour 2026? Que vous alliez aussi à la rencontre des talents mis à l’écart et que vous les regardiez en face.
mon quatrième vœu: que la transparence salariale devienne un levier de dialogue sincère
Le salaire n’est pas une donnée purement rationnelle. C’est aussi le témoin d’une émotion, d’une reconnaissance, d’une estime. Et un signal important.
La directive européenne sur la transparence des rémunérations nous offre l’occasion d’ancrer le principe d’équité, d’expliciter les différences, d’éliminer les frustrations. La transparence seule ne suffit pas. Une politique salariale doit être fondée sur l’appréciation individuelle, le contexte et la reconnaissance des compétences rares.
La dynamique change en effet du tout au tout lorsqu’une entreprise est capable de dire: “Voici ce que vaut votre contribution” au lieu de “Voici ce que nous pouvons vous payer”.
Mon souhait pour 2026? Que vous ne voyiez pas la transparence comme une menace, mais comme un levier de confiance, d’honnêteté et de discussions reportées depuis bien trop longtemps.
mon cinquième vœu: que vous troquiez les échelles contre les réseaux
Les carrières ne sont plus des échelons à gravir, mais des réseaux de compétences, d’expériences et d’opportunités. Cela signifie très concrètement que nous devons miser sur les compétences plutôt que sur les titres de fonction, stimuler la mobilité interne et instaurer des parcours d’apprentissage courts et ciblés pour rendre les candidats rapidement opérationnels sur le terrain. Ici aussi, il est donc bien question de gestion stratégique des ressources humaines.
Mon souhait pour 2026? Que les talents se voient offrir une perspective claire et personnelle. Non seulement sur l’emploi suivant, mais sur une employabilité durable. Pour que l’apprentissage tout au long de la vie devienne une découverte tout au long de la vie.
mon sixième vœu: que le résultat prime sur la présence
La flexibilité est une condition de base de la rétention des talents. Les organisations qui continuent à se focaliser sur la présence et le contrôle perdent leurs effectifs en faveur des concurrents qui osent faire confiance à leurs collaborateurs. Les entreprises qui réussissent sont celles qui misent sur un résultat: des objectifs clairs, de l’autonomie et de la responsabilité.
Cela nécessite un autre type de leadership, un autre mode d’évaluation et une approche RH qui aide les managers à orienter leur coaching vers le résultat.
C’est ainsi que le bureau, au lieu d’être un passage obligé, se muera en aimant. Un lieu où l’on aimera être présent pour travailler ensemble.
Mon souhait pour 2026? Que vous puissiez forger de nombreux espaces de travail magnétiques.
en conclusion
Le changement n’est pas une menace, mais un carburant. La dynamique ne naît pas de projets brillants, mais d’un mouvement, de l’audace de se lancer sans avoir toutes les réponses.
Qu’est-ce qui vous retient? Rarement le temps ou les moyens. Plus souvent l’illusion qu’il est plus prudent d’attendre.
2026 sera ce que nous en ferons. À table. Et non sur la touche.
Olivier Lefèvre, director public affairs & talent advisory services